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A une époque où la peine de mort faisait encore partie intégrante de notre système judiciaire, la responsabilité de l’avocat de la défense était d’une intensité presque insupportable.

Imaginez et mettez-vous dans l’ambiance d’un tribunal austère, les murs imprégnés de l’angoisse des accusés, le regard fixe du juge et au centre de cette scène dramatique, l’avocat luttant non seulement pour l’innocence de son client, mais pour sa vie même. Chaque argument, chaque mot pesait lourdement, car une erreur pouvait signifier l’irréparable.

Dans ces affaires, l’avocat se trouvait face à un dilemme moral constant. D’un côté, il y avait le devoir de défendre son client avec toute l’ardeur possible, en explorant chaque recoin de la loi pour trouver une lueur d’espoir. De l’autre, il devait naviguer dans les eaux tumultueuses des sentiments publics et des préjugés, souvent exacerbés par la nature des crimes de l’accusé.

En effet, en ces temps où la peine capitale régnait, la salle d’audience était marquée par une atmosphère de tension et de désespoir. Les procès étaient alors des spectacles publics, où l’enjeu était non seulement la culpabilité ou l’innocence, mais la vie elle-même. Pour l’avocat, chaque décision était un acte de courage. Le choix des témoins, l’angle des questions, la stratégie de défense, tout était teinté par la gravité de la possible sentence ultime.

Aujourd’hui, la pression liée à la peine capitale a disparu sous nos latitudes. La société a évolué, reconnaissant l’inhumanité et l’irréversibilité de cette forme de punition. Pour le défenseur contemporain, cela signifie que bien que la responsabilité de défendre un client reste immense, elle n’est plus accompagnée par la sombre perspective de voir son client perdre la tête au sens propre du terme. Ce changement a transformé la nature même de la défense pénale.

Les avocats d’aujourd’hui peuvent se concentrer sur la justice sans le poids écrasant de la peine capitale. Ils continuent de défendre les droits de leurs clients avec détermination, mais l’angoisse existentielle de perdre un être humain a disparu. Cela permet une approche plus équilibrée, où l’éthique et la loi peuvent s’harmoniser sans l’ombre de la mort.

Il est crucial de reconnaître que l’abolition de la peine de mort est une avancée majeure pour la justice et l’humanité. Cette abolition reflète une prise de conscience collective de l’importance de la dignité et de la possibilité de réhabilitation. La justice, pour être véritablement juste, doit offrir une seconde chance, et la peine de mort fermait définitivement la porte à cette opportunité.

Cela est sans compter avec l’erreur judiciaire qui pouvait condamner un innocent à l’échafaud, un rappel cruel de la faillibilité du système de justice. L’avocat portait alors le poids de cette tragédie, conscient que la peine de mort n’offrait aucun recours pour corriger une appréciation erronée du tribunal.

La disparition de la peine de mort marque un progrès indéniable vers une société plus juste et plus humaine. Cela signifie une pratique de la défense qui, bien que toujours intense et exigeante, n’est plus assombrie par la menace de la mort.

En fin de compte, les avocats peuvent ainsi continuer à défendre avec ferveur les droits de leurs clients, dans un monde où la vie est respectée et la justice peut être véritablement équitable.

 

Lausanne, le 27 juin 2024

Auteur / autrice

  • Laurent Damond

    Médiateur FSA et Avocat à Lausanne. CAS (Certificate of Advanced Studies) en médiation de l’Université de Fribourg. Brevet d’avocat en 1997. Licence en droit à l’Université de Lausanne en 1993.

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